En Vedette


Voir plus

Le gouvernement du Québec dépose un budget retenu alors que la CAQ se prépare à sa campagne de réélection

Nous associons souvent l’avant-dernier épisode à une grande excitation ou à un suspense qui vous tient en haleine. L’avant-dernier budget du mandat de quatre ans du gouvernement du Québec pourrait plutôt être qualifié d’aride, conservateur, stable, peu inspirant ou transitoire. Il nous porte certainement à nous demander à quoi nous devons nous attendre l’année prochaine lorsque le premier ministre du Québec, François Legault, sollicitera un second mandat majoritaire auprès des Québécois.

Contexte du budget

La semaine dernière, le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, présentait son troisième budget, un budget fort différent de celui qu’il avait présenté le 10 mars 2020, soit quelques jours avant que la province en entier ne soit mise sur « pause » en raison de la pandémie de la COVID-19. Des dépenses et des déficits records ont découlé alors que le gouvernement s’affairait à maintenir l’économie à flot.

Il est important de se souvenir que le Québec est entré en situation de pandémie alors que son économie n’avait jamais été en aussi bonne position depuis une génération, avec des budgets équilibrés successifs remontant à 2015-2016. Le gouvernement libéral de Philippe Couillard a payé le prix politique pour la limitation impopulaire des dépenses publiques, les critiques évoquant à cet égard une période d’austérité, laquelle a en fin de compte eu un rôle à jouer dans sa défaite aux élections de 2018. La Coalition Avenir Québec (CAQ) de François Legault a toutefois profité du travail de mise en ordre des finances publiques du Québec et prévoyait deux autres budgets excédentaires, notamment un surplus budgétaire de 4,5 milliards de dollars en 2019-2020 (finalement, le surplus n’a été que de 3 milliards de dollars). Le ratio de la dette nette au PIB de la province a été réduit, passant de 50,7 % en 2012-2013 à 37,2 % au dernier exercice — inférieur au taux de 39,9 % de l’Ontario.

Une année et une pandémie plus tard

Le Québec a prévu un déficit de 15 milliards de dollars pour l’exercice 2020-2021, et celui prévu pour l’exercice actuel est de 12,3 milliards de dollars. Le déficit devrait être encore ramené à 8,5 milliards de dollars l’an prochain. Néanmoins, aucune hausse d’impôts n’est prévue. Les nouvelles dépenses totaliseront 5,2 milliards de dollars, principalement dans les secteurs de la santé et de l’éducation, et les efforts de relance devraient viser les PME, la culture et le tourisme. Le ratio de la dette nette au PIB a grimpé à 49,5 % et continuera sa hausse jusqu’à l’exercice 2025-2026 avant de pouvoir baisser de nouveau.

Ce qui a retenu l’attention des analystes a été l’annonce du report de deux ans du retour à un équilibre budgétaire, soit en 2027-2028 (pour sept ans au lieu des cinq ans promis en juin dernier).

Ce que vous devez savoir

La première chose à retenir à l’analyse de ce budget est que les élections au Québec sont prévues pour le mois d’octobre 2022. Ce qui signifie que le budget de l’année prochaine sera un budget électoral classique avec de bonnes nouvelles pour presque tout le monde. Le ministre Girard s’est bien débrouillé pour garder une bonne marge de manœuvre pour l’avenir. Alors que la pandémie a fait baisser le PIB de 5,2 % l’an dernier, le ministre Girard prédit une croissance de 4,2 %, soit bien en dessous des 6 % attendus par Desjardins. Ainsi, les revenus ont probablement été sous-estimés.

Le ministre Girard a clairement indiqué qu’aucune mesure ne sera prise pour réduire le déficit budgétaire tant et aussi longtemps que le Québec ne sera pas retourné au niveau d’emploi antérieur à la pandémie. Cependant, au mois dernier, 96,8 % des emplois perdus depuis le début de la pandémie avaient été retrouvés. À 6,4 %, Québec possède le taux de chômage le plus bas au Canada (il était à 5,5 % avant le début de la COVID-19).

De plus, le point du gouvernement le plus repris par les commentateurs est que la crise actuelle laissera le Québec avec un déficit structurel d’environ 6,5 milliards de dollars par année. Cela fait des mois que le premier ministre François Legault demande au gouvernement fédéral d’augmenter considérablement les transferts en matière de soins de santé. Ce n’est pas une coïncidence si la part des transferts qui, selon lui, devrait revenir au Québec s’élève justement à environ 6 milliards de dollars.

Le premier ministre François Legault sait qu’il n’obtiendra jamais d’Ottawa le montant total de 6 milliards de dollars, mais qu’il a une chance raisonnable d’obtenir une augmentation. Si ce n’est pas le cas, cette question deviendra un point de ralliement pour sa campagne de réélection. Compte tenu des estimations de croissance conservatrices, d’une situation de l’emploi qui est proche de celle qu’elle était il y a un an et d’un déficit « structurel » de 6 milliards de dollars qui pourrait être réduit, François Legault et Éric Girard disposeront en 2022 de la marge de manœuvre nécessaire pour augmenter les dépenses publiques dans les secteurs populaires tout en planifiant d’équilibrer le budget beaucoup plus tôt que prévu. Une recette presque parfaite pour les prochaines élections.

En guise de contexte…

Il est possible que nous vivions dans un monde bizarroïde où tout marche à l’envers. L’Ontario n’a pas eu un budget équilibré depuis 2007-2008, et elle ne prévoit pas revenir à l’équilibre avant l’année 2030. Le Québec a connu un surplus budgétaire pour cinq des six dernières années, et peut de façon réaliste espérer un retour à un surplus budgétaire d’ici cinq ans. L’Ontario a désespérément besoin de trouver d’autres sources de revenus afin de payer ses dépenses supplémentaires alors que le Québec se prépare à offrir des cadeaux électoraux.

Mais au moins dans ce monde bizarroïde, les Canadiens se démènent pour faire les séries alors que les Maple Leafs sont en première place.

Pour obtenir de l’aide pour comprendre le Québec ou discuter de cet article, communiquez avec Jonathan Kalles. Pour recevoir les mises à jour spéciales COVID-19 aux deux semaines de McMillan Vantage, écrivez à info@mcmillanvantage.com.


Scroll to Top